Le blog d'eve anne, Madrid.

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Une série étonnante autant que détonante révèle quelques rares talents qui ne peuvent laisser indifférents. Une prise de vue impeccable de nouveauté, une musique originale, des acteurs professionnels, mais aussi des amateurs ou même des figurants inspirés. Véronique Volta est une actrice de métier, mais dont la carrière n’a pas (encore) la renommée qui serait pourtant méritée. Elle est une spécialiste du doublage, mais il est inimaginable qu’elle fût aussi longtemps ignorée des castings. Sa présence est un rayon de soleil, une sensibilité, une féminité qui ne peuvent passer inaperçus. La discrétion faisant partie de sa personnalité, il m’est quasiment impossible de raconter son histoire, mais qu’importe, elle le fera elle-même le moment venu. Je me bornerai donc à présenter les rares photos circulant sur le Net, qui seront accompagnées d’extraits de textes de Jean Claude Izzo, choisis dans l’un de ses recueils :
«
Loin de tous rivages ». Un texte qui colle parfaitement aux paysages de Corse, aussi à l'histoire dramatique de MAFIOSA.

 

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                      AVT Jean-Claude-Izzo 43151 ... La lumière est tout le paysage.
Elle s’est épaissie, approfondie. Cernées les heures se soumettent. Un instant : le temps de moi dans l’immobilité absolue.

Tout autour, je sais les ruines...
Pierres. Elles règnent sur le paysage, s’imposent dans le désordre établi.
Pierres. Leur nombre et leur diversité érigent un royaume où le silence accrédite la solitude.


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AVT Jean-Claude-Izzo 43151 Quiétude inquiète : tout va chavirer.
Alors, dans le blanc des heures, j’annote ce temps, j’émarge la mort. La solitude se fraie un passage. Et aux lèvres la soif, tandis que la terre se craquelle, se fend, que l’œil s’épuise au jeu de l’ombre et de la lumière. Cri—l’immobilité est rompue : vibration de l’air. Le soleil n’est plus perceptible :noyau incendié creusant la clarté jusqu’à la nudité transparente du jour. Midi , équilibre parfait et précaire.Dans le silence. Et, tout autour, ce bâti de pierres débâti ronge la lumière. Sur mon visage les ruines lézardent ma peau.

Ai-je vieilli dans le silence ?Je ne nommerai pas le lieu. Il m’attend au terme de chaque phrase, s’éloigne, m’entraîne plus loin encore. Sans retour, les mots.


 

 

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AVT Jean-Claude-Izzo 43151 Alors gravir : et les noms glissent vers l’oubli. Charnier où mot après mot s’entassent les corps.
Telle est l’Histoire.
Quand le charnier aura atteint le Temps gravi par nous, alors nous saurons.

                                                                                         ...Autre lumière que celle de l’après-midi...
Dans l’épaisseur chaude des heures au repos, le silence s’enlise jusqu’à ne plus savoir où la vie a sa source, ni à quelle fontaine les mots, un jour déborderont la Parole.
Là, j’ai reçu un message de l’ombre.
Une femme enveloppée de deuil s’est dressée entre le paysage et moi, délimitant cet impalpable silence où siège la mort.
Non, je n’ai pas rêvé.
L’absence a pris ce visage.


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AVT Jean-Claude-Izzo 43151 Ma voix soudain sans écho : je suis silence parmi les heures du silence, désespéré tandis que s’élèvent les lamentations.
Seule une parole modelée dans l’argile au plus lointain de cette terre rouge me libérera du rite mortuaire.

...Pris entre le perpétuel et l’éternel, le paysage s’évanouit : il est brèche. Passage inespéré.
Les ruines jalonnent le chemin.

À chaque pas : une pierre renoue avec le sang répandu du côté d’hier, sur la face froide de l’avenir.
—Commémoration—
À chaque pas : écrire ombre sur soleil tant de sang sur tant de sang, d’une encre vive.


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AVT Jean-Claude-Izzo 43151 La lumière s’écorche aux pierres. L’histoire sait qu’elle joue là son avenir, en silence.
À genoux dans l’argile rouge mon berceau, pour un baptème : les heures pulvérisées me sacrent fils de l’impossible humain, poussière.
Ici je dis le lieu de ma naissance, ma pesanteur et le lieu de ma mort, et ma mort elle-même, l’äpre goût du bonheur, l’espoir.

Le temps d’un regard— La terre tenue à bout de bras— la désespérance est en échec.
Debout. Et les cyprès pour indiquer la direction. La montagne, proche, attend, tous chemins offerts, jusqu’à l’indécence.
Je désapprends le chant de l’eau pour le cri des pierres.
Mes lèvres restent liées à ce paysage comme si ma langue ne connaissait que ces seuls mots sans cesse appris, désappris réappris.


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          AVT Jean-Claude-Izzo 43151   Les désastres ne s’improvisent pas.
           Les victoires non plus.

Les mains de l’homme et de la femme sont nécessaires.
L’impassible soleil fut et restera témoin.
Et témoins seront les ruines.
À notre patience, déjà ancienne, ne succèdera pas une nouvelle patience.
Là, sans étonnement, vivre alors le devenir poignant du pays.

Tel est le lieu où, avec pour unique bagage la clarté du jour qui s'estompe, je suis devenu aventurier.

J’ai laissé la parole au faîte des heures. La montagne s’est approfondie à l’éclat du dernier jour.
Dans le silence à l’aplomb tout l’espace à conquérir et aux yeux une voix à trouver.
Un pas alors dans l’air tiède. Le mouvement est rendu à l’heure et se fend la terre en instants épars : les chemins s’ouvrent. Chaque nouveau pas grave dans l’espace une marge gagnée au silence.
Ainsi ai-je écrit : en marge de ce qui est figé mais
— Mais la révolte, mais la glaise rouge des ravines, mais l’eau qui fait défaut, mais la solitude, mais l’amour, mais le ciel s’usant à longueur d’heures, mais le soleil ramenant ses voiles au port le plus proche, mais la mort, mais la fatigue prise au piège du labeur, mais….—


Impatience et vigilance
Extrêmes
Sont les mots d’ordre pour le pays. …


Tiré du recueil « Loin de tous rivages »
« En marge de ce qui est figé »

De

Jean Claude Izzo.

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Sam 28 oct 2000 Aucun commentaire