Le blog d'eve anne, Madrid.

                              

  

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II-Michèle

 

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Naître femme est le pire des chatiments

[ La maison de Bernarda Alba ]
Federico Garcia Lorca

                

                                           Quand j’ouvris la porte de la maison, elle était là, sur le trottoir, et m’attendait. Elle était vêtue d’un manteau de cuir noir, ouvert sur un pull à col roulé, une mini jupe, des bas noirs et des bottes à talons hauts. Je la trouvai extrêmement élégante, et je lui fis mon plus beau sourire. Elle s’approcha et m’embrassa sur la joue. Juste un petit baiser, de quoi sentir son parfum, et la peau douce de sa joue. « On y va à pied, ça ne te dérange pas ? » Cela ne me dérangeait pas. Quand on est jeune et que l’on a ni voiture ni mob, on a l’habitude. La salle des « Dianes » était presque vide. Visiblement, l'espagnol dans le texte, n'intéresse pas grand monde à Compiègne.  Pourtant, "le spectacle " était loin d'être désagréable. J'étais assise à sa gauche, et je la regardais plus souvent que je ne regardais l'écran. Son profil était joli, elle avait les traits fins, et, à la lumière changeante de l'écran, j'admirais les ombres se promenant sur son visage. Il me sembla qu'elle suivait le film avec application. Je descendis le regard, et je voyais son pull respirer doucement. Ses jambes croisées haut, laissaient voir un peu de la cuisse, la jupe était invisible. Vision suggestive s'il en était. C'était la première fois que je détaillais les charmes d'une femme, d’aussi près, avec autant de naturel. J'étais là, elle avait voulu que je sois là, et je faisais le plein de visions pour me les repasser plus tard, quand j'en aurai besoin. Son visage se tourna vers moi et me sourit. Je vis un éclair dans son regard. Doucement elle me prit la main, et la posa sur son genou. Je retenais mon souffle, mais je la laissais là, voulant qu'elle soit la plus légère possible. Je fermai les yeux, et  je me concentrai sur l'extrémité de mes doigts. J'étais au paradis. Le film se termina, sans que j'eusse capté une seule parole.
"Cela t'a plu ?"
- Enormément, répondis-je en osant à peine sourire".
-Tu veux que je te dise? Tu es une vraie coquine"  Je ne répondis rien, je me sentis autorisée à me rapprocher et à lui prendre la main. Elle se laissa aller à cette caresse, et je sentis ses doigts se resserrer sur les miens. Elle me laissa devant chez moi. Un autre petit baiser, au coin des lèvres cette fois, et je la regardai s'éloigner sans la quitter des yeux. Sa démarche était féline. Je la perdis de vue, et je restais sur place, figée, essayant de me persuader que j'avais vraiment vécu ces quelques heures, et que ce n'était pas un rêve.
A ma grande surprise, durant les trois semaines suivantes, il ne se passa rien. Rien qui soit en rapport avec notre sortie au cinéma. Je me sentais de plus en plus frustrée. Puis un jour, en cours, alors qu'elle interrogeait chaque élève, lui demandant d'expliquer ce qu'il espérait recevoir en cadeau de Noël, elle m'adressa enfin la parole:
«Et toi Eve Line, que voudrais-tu pour Noel ? Et moi je répondis du tac au tac ces vers d'une poésie que j'avais apprise la veille:

Yo quisiera
muchas cosas.
Pero lo que más quiero,
es que tú me quieras.


            Je voudrais beaucoup de choses. Mais ce que je veux le plus, c'est que tu m'aimes.

J'avais à peine fini ma tirade, que j'étais rouge comme une tomate. Elle me regarda, avec un franc sourire, et sans me quitter du regard elle ajouta:
"Prenez exemple sur Eve-Line, et apprenez la poésie espagnole. Il y a de très jolies choses qui vont droit au cœur". Je ne sais si quelqu’un dans la classe avait saisi l’échange, mais au fond, je ne regrettais rien. J’avais reçu en échange ce sourire éclatant et ce regard appuyé. Il me fallut attendre deux semaines encore avant qu’elle vienne vers moi un soir en fin de cours.
« Eve-line? La semaine prochaine c’est ton anniversaire ?
-Oui, c’est jeudi.
-Alors je t’invite chez moi et je t’offre le gâteau. On aura tout l’après midi, on fera une balade. » J’aurais voulu quelque chose pour m’appuyer, mes jambes se mirent à flageoler, j’étais heureuse comme jamais je ne l’avais été. Je me précipitai pou l'embrasser.
La semaine me parut longue, je n’ai pensé qu’à ça. Et sans cesse je me reposais la question : 
« Mais pourquoi moi ? Je ne suis qu’une petite godiche, il ne pourra jamais y avoir autre chose entre nous que des balades, 13 ans d’écart, c’est monstrueux, elle ne sera jamais amoureuse de moi, et moi, comment ferai-je après quand elle m’aura jetée ? » Je n’osais pas réellement envisager cette issue, n’arrivant déjà pas à imaginer ce qu’il pourrait y avoir entre nous. Et puis, elle est mariée, moi je préfère sortir avec des filles, mais elle ? Cette question, je la retournais mille fois dans ma tête, la nuit, le jour, pendant ses cours, où elle m’ignorait totalement.
Et puis le temps est ainsi fait que tout finit un jour par arriver. Le jeudi suivant j’étais pile à l’heure convenue, en bas de son immeuble. Cet immense bâtiment rococo de la rue St Lazare, immeuble de standing comme on disait à l’époque. Je sonnai en face de son nom, et sa voix dans l’interphone : 
« Entre, l’ascenseur est à droite, c’est au troisième ». La porte s’ouvrit de l’extérieur, elle était là, souriante, visiblement contente que je sois venue. Après quelques mots échangés, elle me dit : 
« On va sortir maintenant, sinon on rentrera de nuit »
« Ok; ton mari n’est pas là ? » C’est la première fois que je prononçais ce mot. « Non, il est à Creil chez ses parents. Il pose du papier peint. Il rentrera tard » Nous partîmes à pied, bien sûr, direction la forêt. Il faisait un froid de canard, et c’est presque naturellement que l’on se serra l’une contre l’autre. Etait-ce pour avoir plus chaud ? On parla un peu de tout et de rien. Elle me raconta un peu de ses jeunes années en Espagne, j’avais oublié qu’elle était espagnole de naissance. Elle parlait français de façon impeccable, sans aucune trace d’accent.
« Je suis arrivée en France à 17 ans, j’ai eu le temps d’apprendre! Ce qui est drôle, c’est que je suis née dans le même village que Garcia Lorca : à Fuente Vaqueros, à côté de Grenade. Hé oui, je suis une Andalouse, et je danse le flamenco ! 
- Et pourquoi es tu venue en France ?
-Pour apprendre le Français, je voulais être prof de Français en Espagne, Mais j’ai eu une prof intelligente qui m’a conseillé de faire l’inverse, et me voilà !» Après nous être assises un moment sur un arbre tombé, nous sommes revenues à l’appartement.
« Je vais me prendre une douche, j’ai beaucoup transpiré sous mon manteau, je vais faire vite, tu pourras faire comme moi ensuite, et après, le gâteau ! Elle finissait à peine sa phrase qu’elle était à moitié dévêtue. En slip et soutien gorge, elle retirait ses bas. C’est en cet instant que j’ai découvert combien ce geste pouvait être érotique. Je la regardai médusée. La poitrine, bien que modeste emplissait bien les bonnets, et quand elle dégrafa le soutif, les seins apparurent, bien fermes et bien hauts. Certaines femmes mettent un soutif, on se demande pourquoi, des jolis seins comme ça, ça tient tout seul. Elle se dirigea vers la salle de bain, enleva le slip juste avant d’entrer dans la cabine de douche. C’est à peine si je pus voir une belle chute de reins, et une minuscule toison noire, la porte s’était déjà refermée .Tout alla très vite. Sans réfléchir je défis mes vêtements aussi vite que je le pus, et avec beaucoup de précautions, j’ouvris la porte de la douche et j’entrai avec elle. J’avais l’impression de vivre une folie. Pourtant, Michèle ne parut pas surprise, peut être souhaitait-elle que ça se passe comme ça ? Je me collai à son dos, enserrant sa taille de mes bras, je posai ma tête sur son épaule, et je fermai les yeux. Je ne sais plus si c’est elle ou moi qui nous remit face à face. Nous étions de la même taille. Elle se colla contre moi, me serrant très fort. Mes seins était écrasés sur sa poitrine, je ne cherchais pas à me séparer d’elle. Ses mains me caressaient le dos, puis revinrent devant me caresser les seins. Par hasard ou pas, nos lèvres étaient proches, et c’est Michèle qui les avança vers moi. Ce fut une sensation intense. J’étais toute à elle, elle aurait pu faire de moi ce qu’elle voulait. Elle me fit des baisers sur tout le visage, dans le cou, elle prit mes tétons entre ses lèvres, et m’aspira violemment. L’eau coulait dans un bruit d’enfer, je ne l’entendais pas, et ce n’est pas l’eau qui me faisait suffoquer. Elle s’écarta un peu, prit le flacon de savon, en versa dans le creux de sa main, et commença à m’enduire de mousse. Les épaules les seins le ventre les fesses, elle se baissa pour savonner mes cuisses, elle était à la hauteur de mon entrejambes, sans s’étonner apparemment que je sois épilée. Mais elle ne me « toucha » pas d’avantage, je lui pris le flacon et je fis de même. Les seins surtout me parurent d’une souplesse étonnante, les fesses haut perchées étaient douces et rondes, les hanches étaient galbées. Tout cela me parut irréel, mais comme elle, je n’allai pas plus loin. Elle décida subitement que c’était fini, ferma le robinet, Et la séance d’auto séchage commença. Elle me raccrocha le soutien gorge, Et d’une dernière caresse sur le dessus: 
« Quelle jolie poitrine !
- Je t’en fais cadeau "répondis-je." Tu l’as si bien caressée…
- Mieux que Lucie ?
-Oui, beaucoup mieux.» Je ne sais pas pourquoi elle a dit ça, ça m’a pris de court. Elle remarqua mon hésitation. 
« Excuse moi, je suis idiote. 
- Ce n’est rien. Ce n’est pas un secret. Lucie est ma première liaison. »
« Allez viens, j’ai une faim de loup» C’est vrai que le gâteau était appétissant, glacé, fourré de framboises, avec ses 15 bougies. Je les soufflai bien sûr, en une seule fois, j’étais émue j’avais les larmes aux yeux. 
« Merci, je suis heureuse, je ne savais pas que le bonheur faisait pleurer.» Michèle me regardait avec amusement et me tamponnait doucement les paupières d’un petit mouchoir de dentelle.
« Ça va aller, tu es une grande, tu es très belle et très sensuelle, J’aimerais beaucoup que tu reviennes me voir». Toutes les bonnes choses ayant une fin, le fatal « je vais te raccompagner » sonna comme le glas.
« Ne te donnes pas cette peine, inutile que tu ressortes.
- Il manquerait plus que ça, à cette heure-ci tu pourrais être kidnappée par une dame plus jolie que moi dit elle en riant.
- ça c’est impossible.
-Alors on se dit au revoir ici, Embrasse-moi encore. Ajoutant le geste à la parole, elle se colla à moi, et le baiser fut long, long…..
« Au fait, Ève line, ça ne te va pas, je vais t’appeler
« eve anne »  ???????????????? ?« C’est la première syllabe de ton prénom et la première syllabe de ton nom. Ça te plait ?
- Pourquoi pas? Vamos pour eve anne." Après un dernier baiser, elle me laissa partir, « à Demain mon cœur ».
eve anne était née, je décidai de ne pas utiliser ni majuscule ni tiret, je ne sais plus pourquoi, peut être simplement pour faire beau. C’est vrai que c’était réellement une naissance, une passion soudaine, une histoire incroyable que je n’aurais jamais osé rêver. J’adorais Michèle, plus, je la vénérais. Je suis sûre qu’elle m’aimait aussi, je ne sais pas pourquoi, mais je le sentais profondément à l’intérieur de tout ce que j’avais de plus sensible.
Ce fut le plus bel anniversaire que je n’ai jamais eu,



et je souhaitais qu’elle ne l’oubliât jamais.


 
                               

 

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Jeu 21 jun 2007 2 commentaires

J'ai commencé la lecture des Tribades, et c'est un réel plaisir que de vivre avec toi tes premiers émois de jeune fille face à Michèle. J'aime beaucoup la manière subtile dont tu décris ces premiers moments... Je te ressens complètement fascinée par la beauté d'un corps de femme et j'aime parce que je me retrouve totalement dans cette fascination. Merci eve anne.

Ophélie Conan - le 13/05/2010 à 23h15

Ma belle amie, tu as entrepris une histoire de près de 600 pages ! mais il se passe tellement de choses dans cette biographie romancée ! Je sais que tu es une de mes lectrices assidues, et tu passes beaucoup de temps sur mon site. j'en suis très flattée. merci.

eve anne

Ma très belle, tout le plaisir de cette lecture et de cette promenade en forme de rêverie sur ton blog est pour moi... Je t'embrasse. Ophélie

Ophélie Conan - le 15/05/2010 à 00h05