Le blog d'eve anne, Madrid.

                              

 

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LIX-L'épilogue.

 

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Je suis angoissée de cette fleur d'orage que tu m'avais donnée.

Jean Paul Guibbert
 

 

 


                                   Je pouvais toujours me répéter ça, je sentais au fond de moi que j’avais un sentiment d’attirance pour cette gamine. Elle était jolie, elle était joyeuse, et elle aimait jouir. Je la sentais capable de développer un véritable attachement, pour ne pas parler d’amour. Mais je savais aussi que ce genre de relation ne pouvait exister dans le temps, que c’était trop visible, qu’il y avait trop de spectateurs possibles, trop de détails oubliés, et de traces non effacées. J’eus l’envie de me renseigner sur les parents de la petite, mieux valait savoir à qui l’on avait à faire. Je passai chez monsieur Ignace G… qui était le détective spécialiste des enquêtes pour infidélités et autres désordres conjugaux. Il avait travaillé pour mon père, pour une vague histoire de vol. J’expliquai ce que je voulais, il me comprit tout de suite, et je lui versai un acompte. La réponse ne tarda pas. J’appris ainsi que le papa était directeur de l’une des grandes banques de la ville, et que la maman ne comptait plus ses amants. En une semaine d’enquête elle en visita deux et en reçut un autre. Je demandai à Ignace de concentrer ses recherches sur elle. J’appris ainsi, qu’elle avait connu son époux sur le champ de courses de Chantilly, où elle exerçait le plus vieux métier du monde. L’homme ne sut pas me dire si le papa connaissait le passé de la dame. Pour moi, cela ne me choquait pas, je n’ai rien contre les prostituées, à partir de l’instant où elles savent se tenir, en évitant la vulgarité. De plus, je suis consciente que j’aurais très bien pu basculer dans cette profession. La dernière information reçue de Monsieur Ignace, fut pour me dire que le papa avait une relation avec un homme connu dans les milieux homos de la ville. Je pensai tout de suite à Luigi, et cela me fit sourire. Ce serait trop drôle ! J’essayai de ne plus y penser. Mais l’envie fut plus forte. J’appelai Luigi.
« Non, ce n’est pas moi. Je ne sais rien, Je ne peux rien te dire.
— Laisse-moi deviner ?
—Pourquoi veux-tu savoir ça ? A quoi cela va-t-il te servir ?
—J’ai une aventure avec sa fille, elle est mineure, je veux avoir des arguments pour ne pas être embêtée.
—Tu dérailles complètement. Ça ne te ressemble pas. Laisse tomber.
—Bon je te laisse tomber aussi alors ?
—Comme tu veux.
—Tu es con comme un balai.
—Je le sais merci. Bonne soirée » Et il raccrocha. Je n’étais pas si fière que ça. Pourquoi n’avait-il pas voulu me le dire ? Parce que c’était quelqu’un que je connaissais, soit Christian soit Armand. Monsieur Ignace me donna la réponse le lendemain, c’était Christian. Puis il y eut ce jour de grève des profs au lycée, et Aline fit semblant de passer la journée sur place. C’était l’idéal : pas d’appel, pas de contrôle, elle passa l’après midi chez moi, avec moi, et je l’ai aimée comme une folle. Je tombai amoureuse de ses formes encore adolescentes, du parfum de sa peau, du toucher soyeux de ses seins, de ses aréoles qui voulaient encore grandir, de sa voix muante un peu cassée qui murmurait des mots étranges. Elle fut exceptionnelle d’inventivité, de désir et de tendresse. Infatigable et avide de toutes sensations. Le temps passa très vite, et quand il fallut atterrir, il me fallut un courage cornélien. Au moment de nous séparer, face à face, les yeux dans les yeux, regard humide, regard tendre, ce n’était plus Aline la lycéenne. C’était une jeune femme en pleine possession de ses pouvoirs de séduction. C’était une jeune femme débordante de féminité, de besoin d’aimer, Aline avait grandi, dans mes bras, entre mes lèvres. Je ressentais à ce moment-là quel avait du être le plaisir de Michèle quand, avant de nous quitter, elle m’avait regardée pour la première fois comme une femme.
« On ne se reverra plus Aline, nous sommes allées trop loin.
—Arrête ! Je savais que tu allais me dire ça, c’est dans tous les feuilletons !
—Et alors ?
—Mais je ne te crois pas. J’ai senti comment tu m’as aimée, et je sais que tu ne pourras plus t’en passer. Tu rêveras de mes plops, tu auras soif de mon sexe. Le parfum de ma peau te suivra partout. Le goût de mon titi te manquera, tu chercheras mes yeux pour t’admirer, tu auras besoin de sentir mes dents sur tes gros tétons, de ma main plantée entre tes cuisses, et de ma tête sur tes seins. Tu aimeras mes cheveux collés sur ta peau. Tu es amoureuse de mon corps et ça te fait peur. Moi, je suis heureuse, j’en rêvais. C’est comme ça que ça fait quand on est amoureuse non ?
—Oui ma déesse, tu as raison, mais il faut s’arrêter là.
—Tu tiens absolument à être désagréable?
—Non, je tiens à ce que tu offres ton corps à une fille de ton âge. Je pars dans deux mois.
—Arrête tes salades, aucune fille de mon âge ne m’aimera comme tu l’as fait. Deux mois ? Alors nous avons le temps !
—Non, quelqu’un nous surprendra, et tes parents seront au courant.
—Je m’en contre-fiche. D’ailleurs ma mère te connaît. Elle était à l’école avec toi. Elle m'a dit que tu étais une gouine pur sucre, et qu’au lycée tu couchais avec des noires et des femmes profs.
—Avec une seule de chaque. Elle s’appelle comment ta maman?
—Nicole, son nom de jeune fille c’était Laurent.
—Oui, je me souviens. Elle était super belle. Elle, draguait tous les garçons même les profs.
—Je crois qu’elle a un amant, peut être deux. Ça m’est égal.
—Ce n’est pas grave, si ça lui fait du bien. Et pourquoi avez-vous parlé de moi ?
—Je lui ai dit que je t’avais rencontrée à la piscine et que tu nageais comme un poisson. Elle m’a dit de me méfier que tu étais capable de me violer.
—Tant que je ne te mets pas enceinte ! Et ton papa ? Il fait quoi ?
—Banquier. Je suppose qu’il saute ses employées. C’est un cavaleur dit ma mère. Ils ne s’entendent pas très bien. Il est copain avec ton ex. Ils font du squash tous les deux.
—C’est très bien. Le sport il n’y a que ça de vrai, et ça crée des liens! » J’avais dépensé de l’argent pour tout savoir, et elle m’avait tout dit. Je la laissai partir vers mon oubli. Du moins, c’est ce que je voulais. Je la quittai avec toutefois un sentiment de malaise. Sa ressemblance avec moi à son âge était frappante. Peut être étais-je un peu plus romantique, peut être étais-je plus discrète dans mes élans ? Autres temps autres mœurs, mais j’avais un peu honte, et pour couronner le tout, je n’aurais pas le courage d’assumer comme Michèle l’avait fait avec moi.

 Monsieur XXX me prévint qu'il avait effectué le virement sur mon compte. Il me demandait rendez vous pour préparer la passation de pouvoirs. Voilà. J'étais au pied du mur. Je recevais le message avec le sentiment d'avoir fini quelque chose d'important. C'était la réalité. En quelques années, j'avais bien travaillé. J'avais eu la chance de frapper à la bonne porte quand j'ai débuté. Simone m'a donné toutes mes chances, je lui dois tout. J'ai créé cette agence de mannequins de toutes pièces. C'est une affaire originale, qui m'a rapporté beaucoup d'argent. C'est une affaire saine, avec des filles extraordinaires. Mais voilà. J’étais démotivée. Cette affaire était la nôtre avec Marie Noëlle. Bien qu'elle n'ait pas voulu y participer. Elle n'a jamais eu le sens des affaires. Je ne me sens ni lasse, ni dégoûtée. Au contraire, je sens en moi une volonté d'inventer autre chose, autrement, ailleurs. Je sais que « mes filles » seront déçues, mais elles comprendront. Et puis, le monde est petit. Une petite crainte cependant, que ma fille supporte mal les changements, les bouleversements qui allaient pleuvoir sur notre quotidien. Je sais qu'une femme aura beaucoup de mal, Maud, qui allait perdre en même temps sa petite fille et son amante, après la disparition de sa maman. Séparation douloureuse qu'elle n'aura pas méritée, aucun reproche ne pouvant être porté à son crédit. Maud m'a donné des années de vrai bonheur.
 Je me sens comme le jeune aventurier sur les remparts de Saint-Malo, le regard perdu vers l'horizon, avec l'envie folle de partir à la découverte. J'ai le sentiment que je n'ai plus rien à faire ici, que je ne servirai plus à rien ni à personne. Je me dirigeai vers la forêt. J'allais garer ma voiture sur le parking du Carandeau. Deux autres voitures y étaient stationnées. Je pensai à un rendez vous galant, mais c'était peut être simplement des promeneurs ou des pêcheurs. Je partis à pieds sur le sentier qui fait le tour de l'étang. Beaucoup d'arbres avaient été coupés, le spectacle était désolant. Je marchais doucement, je pensais que je devais voir Monsieur XXX le plus tôt possible, il ne fallait pas traîner. Le premier Mai était dans deux semaines. Je devais prendre rendez vous avec les services des impôts. Je souhaitais payer les taxes sur la vente au plus tôt, pour pouvoir répartir l'argent entre les filles de mon brain-trust. La solution que j'avais choisie pour la répartition était de répartir également la moitié de la somme que je leur cédais, et l'autre moitié proportionnellement à leur ancienneté. Je voulais que ce soit solutionné rapidement. Du moins avant mon départ pour Madrid. Il fallait aussi que je contacte Michèle. Sans vouloir la mêler à ma vie, j'avais besoin de quelques renseignements, ne serait-ce que l'adresse d'un lieu d'accueil pour y séjourner le temps de me retourner et de trouver mes marques. Je n'avais pas l'intention de louer ni de vendre mon appartement de Compiègne pour l'instant. Je le mettrai à la disposition de Maud et d'Odile, et on verra plus tard. De même pour la maison héritée de mes parents, qui était louée aux mêmes personnes depuis des années, il n'y avait pas lieu de changer quoi que ce soit. A Paris je garderai aussi l'appartement et le studio, en location eux aussi, et les murs du bistro à coté de l'agence. Je regretterai peut être sa terrasse ensoleillée, et les croque-monsieur du midi en compagnie d'Armand. Et j'essaierai d'oublier « mes filles », et mes « garçons » j'appellerai Luigi pour m'excuser, finalement, une fois de plus il avait voulu me préserver. J'avais été très heureuse des folies que m'avaient offertes ces garçons et ces filles. Et j'allais abandonner tout ça, comme ça, sans me retourner. Le temps des regrets n'était pas au programme. De l'ingratitude? Oui, sûrement, mais c'était ma vie.
J'aperçus quelques mouvements dans les buissons. Une laie partait du sentier, vers le sous bois, en direction de ce que j'avais cru discerner. Quelques pas encore et je tombai sur deux jeunes hommes qui se donnaient quelques petits plaisirs. Ils ne m'avaient pas entendue venir, ce qui me permit de mater discrètement. C'était une belle sodomie, qui allait bon train. Le passif était appuyé sur un tronc couché, il était nu, et l'autre avait le pantalon sur les chevilles. Pas très esthétique. Le membre me sembla très gros, et pénétrait pourtant très facilement entre les fesses du garçon. Je trouvai la scène un peu ridicule, et je me retirai doucement. Je ne sais pas s'ils se sont aperçus de ma présence.
J'aimais bien cette balade autour de l'étang. C'était un endroit favori pour les partisans de rencontres sylvestres. Mais ceux là, ceux que j'ai vus, espéraient sûrement se faire voir, l'exhibe était monnaie courante en forêt. Bizarre, il y a quelques temps encore, je me serais approchée, je me serais saisie de l'autre sexe inutilisé, qui se balançait tristement ramolli, et je me serais faufilée dessous pour le prendre à pleine bouche, pour en tirer toute la sève. Mais peut être me serais-je fait jeter. Il y a des homos un peu violents. L'envie ne m'en était pas venue; preuve que quelque chose changeait en moi. Je continuai la balade, et je respirai cette odeur de sous bois avec délice. Y aurait-il le même parfum dans les sous bois proches de Madrid? Sans doute, ou bien d'autres. Je crois me rappeler que Madrid se trouve assez haut, 650 mètres quelque chose comme ça, et la montagne, (la Sierra) n'est pas loin. Je pense que l'on aura plein de belles choses à découvrir.
La passation de pouvoirs eut lieu en toute simplicité. Présentation des personnes, description des postes, état du carnet de commande, état d'avancement, respect du planning, prévisionnel de trésorerie, etc. Le lendemain j'avais rendez vous aux Impôts où je fus reçue avec amabilité et courtoisie. Ma demande fut exécutée immédiatement, devant moi, et je fis le chèque correspondant. Il me resterait à payer les contributions sociales, mais je savais que ce serait égal à 10%. Je pus organiser ma dernière soirée avec les filles, ce que nous fîmes dans une superbe auberge de Chantilly. Chacune y mit du sien pour que la soirée ne soit pas larmoyante. Lorena m'avait fait signer les chèques et les avait distribués dans l'après midi. Pour certaines, Linda par exemple, cela faisait une jolie somme. On partagea un repas léger mais très fin, et on termina la soirée par quelques slows. Vers la fin, l'atmosphère s'emplissait de tristesse, il était temps de partir. Je demandai à Armand s’il acceptait de me raccompagner. Comme ça, pas de jalouses. Il était le seul garçon de la soirée. Voilà, j'avais fini la semaine, le mois, et ma carrière de cheffe d'agence. Je pourrais mettre un « s » à agence, parce qu'en fait, il y en avait bien deux, en comptant l'école de mannequins. Pour celle-ci, Puce avait accepté de prendre la relève. Je rentrai à l'appartement, avec Armand. On se tenait par la main. J’avais garé la voiture assez loin, et cette balade nocturne dans cette rue déserte avait quelque chose de très romantique. Arrivés devant la porte, je le vis hésiter timidement. Son air puéril me fit sourire. Puis, s'enhardissant:
« Je monte?
─ A moins que tu ne préfères dormir dans la voiture...
─ Non, je monte!
─ Tu ne seras pas obligé de consommer. Tu n'es plus contraint de te soumettre aux appétits de ta patronne!
─ Tu sais bien que je t'aime. Et si tu voulais de moi, je partirais avec toi sans hésiter.
─ Pas question, un mari m'a suffi.
─ Oui, mais là je ne serai que ton amant.
─ Oui, et j'en serais sûrement heureuse, mais ça n'est pas dans mes projets. Tu te contenteras de Maud. Elle a un corps magnifique et c'est une belle amoureuse.
─ C'est vrai, elle est très séduisante. Je ne dirais pas non, mais je n'oserai peut être pas!
─ C'est incroyable! Tu feras comme tu voudras. » Quand j'ouvris la porte de l'appartement, il y avait de la lumière. Je fis entrer Armand, et je refermais la porte. Je pensais que Maud avait oublié d'éteindre. Mais non, Maud était là, sur le canapé, elle regardait un film à la télé avec le casque-son sur les oreilles.  Je vis son air étonné. Elle vint vers moi, et me sourit en m'embrassant.
« Je suis confuse. Je ne pensais pas que tu rentrerais si tôt, je regardais la fin du film, Axelle dors chez Odile.
─ Mais c'est très bien au contraire. On va se prendre un petit digestif.
─ Armand, tu connais Maud, ne fait pas le timide. Installez vous je fais le service. J'allais dans la cuisine chercher des glaçons, et Maud me suivit. Avant qu'elle ait ouvert la bouche, je lui demandai à voix basse:
« Tu restes avec nous? » Je vis tout de suite à l'éclair qui passait dans ses yeux qu'elle était heureuse de la proposition.
─ Mais que va-t-il dire?
─ On verra bien. » De retour, je m'adressai à Armand:
« Maud serait heureuse de rester avec nous, ça te gênerait?
─ Pas du tout, bien au contraire. C'est une bonne idée, merci Maud. » Je n’eus pas besoin de doper les alcools pour faire monter la température. L’émotion de mes invités était palpable, Maud, émue devant ce garçon d’une virilité exceptionnelle, et Armand presque timide devant cette femme mûre, au corps d’une jeunesse étonnante. Au contact de la magnifique poitrine de Maud, il sembla s’enhardir, et le désir fit le reste. Je passai un moment indescriptible à participer à ces jeux amoureux. C’est la première fois que je voyais Maud dans les bras d’un homme, et elle ne dissimulait pas son plaisir. Elle n’avait rien d’une débutante, et savait comment satisfaire son amant. Ces étreintes durèrent une bonne partie de la nuit. Armand retrouva très vite les moyens de m’emmener au ciel tandis que Maud me couvrait de caresses. Nous nous sommes endormis sans nous en rendre compte. C’est Odile qui vint nous apporter le petit déjeuner. Elle entrait ainsi dans l’appartement, nullement gênée de nous voir sortir de nos rêves, embués de nos folies nocturnes. Mais avant de repartir, elle me glissa un mot à l’oreille :
« La prochaine fois, c’est Maud qui gardera la petite, et je prendrai sa place.
─ Je ne sais pas si elle sera d’accord, mais on trouvera bien une solution !» Si Armand fut étonné de cette intrusion matinale, il ne le laissa pas paraître, et fit honneur aux croissants parfumés qu’Odile était allée chercher chez la petite boulangère de la rue de Paris. L’amour le mettait en appétit. Quant à Maud, elle semblait en difficulté au téléphone. C’est vrai qu’elle avait « oublié de prévenir » comme elle le faisait habituellement quand elle restait avec moi pour la nuit. La nouveauté l’avait troublée sans doute. Le lundi venu, je me levai sans l’obligation d’aller à Paris. Je pensai à mes filles qui allaient être un peu décontenancées avec ce patron dont elles ignoraient tout, même que c’était un chaud lapin. Mais elles ne sont pas forcément comme moi, prête à sauter sur toutes les bonnes occasions. N’empêche, ça doit leur faire tout drôle. Je commençai par appeler Isabelle pour m’assurer que notre rendez vous du lendemain était toujours d’actualité. Il l’était, à l’écouter, elle était même impatiente. J’appelai ensuite Simone, et je fus heureuse de l’entendre. Ensuite j’allais au garage Renault, et je leur demandai s’ils avaient quelque chose à me proposer. Pour mon nouveau job j’allais multiplier les km, et j’en avais vraiment marre de me taper le cul dans la BM. Ils me proposèrent une Velsatis 3.5litres six cylindres en V. La voiture ne me tentait pas plus que ça. Je trouvai sa ligne totalement ratée, je la trouvai monstrueuse, et en tout cas, tout, sauf féminine. Et là, le patron du garage, que je connaissais depuis toujours me proposa :
« Je te prête la mienne pour le temps nécessaire, tu en fais ce que tu veux, tu la pousses à fond si tu en as envie. Tu peux même faire du tout terrain, tu seras étonnée, cette voiture est unique, elle n’a pas d’équivalent. » Après tout, pourquoi pas ? Je montai dans la voiture. Et là je sus ce que voulait dire « monter en voiture » la position de conduite était exceptionnelle. Je pris la direction de la forêt, et je fus immédiatement séduite par l’extraordinaire confort du véhicule. Le souffle du six-cylindres était à peine perceptible. Un murmure, tout au plus. Tout à mon étonnement, je freinais à la dernière seconde devant le daguet qui venait de se planter juste devant moi. Avec la BM, je l’aurais percuté, c’est certain. Là, la voiture stoppa à quelques centimètres des yeux ébahis de l’animal. Je n’avais jamais vu un freinage pareil. Et tout fut à l’avenant, je me plus à écouter la Traviata avec cette chaine Cabasse incomparable. Je ne savais pas que mon copain garagiste aimait la musique classique. Je fus emballée par la voiture. Je m’arrêtai au parking de Sainte Perrine, et j’allais m’installer derrière. Le dossier avant reculé, il restait encore la place de ranger mes grandes pattes d’antilope. J’ouvris le coffre, surprise, il était immense, et chose étonnante pour une voiture d’homme, impeccable de propreté. La voiture avait cinq mille km, elle tournait comme une horloge. En plus du confort, elle dégageait une puissance exceptionnelle, ce qui lui donnait une réactivité surprenante. Je fis un essai de démarrage en côte à Pierrefonds. Avec le frein électrique, ce fut un jeu d’enfant. Et les créneaux pensé-je ? Je retournai en ville pour un essai. Les radars avant et arrière se montrèrent d’une efficacité parfaite. J’étais convaincue. Seul inconvénient, au parking sous-terrain, il fallait prendre deux places si on voulait sortir de la voiture. Mais je remarquai que tous les 4x4 étaient logés à la même enseigne. C‘était le parking qui était nul, pas la voiture. Je vis que la voiture était équipée d’un crochet d’attelage. Je pensai que ça ne faisait pas très chic, un peu camping en caravane ! Mais l’idée fit son chemin, et j’imaginais très bien acheter une remorque pour descendre à Madrid, ce qui me permettrait d’emporter toutes nos affaires en une seule fois ! Et là bas sur place, je la revendrai pour ne pas avoir à la garer. Je décidais d’’acheter cette voiture.
Le lendemain je retrouvais Isabelle avec un immense plaisir. Comment avais-je pu ignorer cette merveille durant toutes ces années ? L’amour avec elle est une récompense, une magnifique aventure qui hélas ne durera pas au-delà. Je préférais éluder cet avenir tronqué. Je lui demandai un service, dont je ne voulais pas parler au téléphone. Je lui demandai de me procurer les coordonnées du Sergent Le Thellier.
« Je ne sais pas si c’est une bonne idée !
─Fais ça pour moi veux-tu ?
─Ok. Mais je ne voudrais pas que Pierre l’apprenne.
─Sois sans crainte. C’est juste pour parler d’elle.
─D’accord, mais à une condition. C’est que tu reviennes faire l’amour avec moi.
─Tes conditions sont tentantes. J’adore te faire l’amour.
─Moi aussi. Souvent je me demande pourquoi nous avons attendu tout ce temps. Alors je me console en pensant que tu avais voulu garder la meilleure pour la fin !
─Oui peut être, mais tu avais parfaitement caché ta nature. Je savais que tu n’étais pas contre, mais je ne savais pas si tu avais envie.
─Pierre ignore tout, et je ne voudrais pas qu’il l’apprenne. D’ailleurs, tu dois être la seule à savoir.
─Mais alors comment fais tu ?
─J’ai mes secrets.

 

 

 

─Ok. J’aime ! Je me ferai à l’idée d’être un secret. »

 

 

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Mer 25 avr 2007 Aucun commentaire